Covid-19 : droit de rétractation et conditions suspensives

Vous signez un compromis de vente pendant l’état d’urgence sanitaire et vous vous demandez si les règles ont changé en matière de délai légal de rétraction et de conditions suspensives ? On fait le point.

 

Ventes immobilières : rappel du déroulement classique

Lors d’une vente immobilière, acheteur et vendeur signent un avant-contrat (promesse de vente ou compromis de vente) qui les engage mutuellement à réaliser la transaction. Cet engagement est soumis à des conditions suspensives (financement par exemple).

Une fois l’avant-contrat signé par les deux parties, l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation ouvre un droit de rétraction de dix jours (ou de réflexion) à l’acquéreur (pour un bien à usage d’habitation) qui peut l’exercer sans motif particulier. A noter : ce droit de rétraction ne vaut que pour les acheteurs particuliers (non professionnels) qui achètent leur logement. Côté vendeur, nul délai de rétractation. La signature du compromis l’engage immédiatement vis-à-vis de l’acheteur.

Dans le cas d’une acquisition nécessitant un emprunt bancaire, l’article L. 313-41 du code de la consommation fait de l’obtention du ou des prêts une condition suspensive dont la durée de validité ne peut être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l’acte. Cette mesure permet de protéger les particuliers en soumettant l’acte d’achat à la condition d’obtention du prêt. Dans les faits, le délai d’obtention prévu est généralement porté à 60 jours pour permettre à l’acheteur d’effectuer toutes ses démarches.

Covid-19 et immobilier 1ère étape : l’ordonnance du 25 mars 2020

L’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 change la donne. Il prévoit la suspension des délais légaux inhérents aux transactions immobilières et ce, jusqu’à la fin de l’urgence sanitaire (période du 25 mars 2020 au 24 mai 2020). Plus précisément, il repousse les délais échus jusqu’au 24 mai prochain et ajoute une suspension supplémentaire d’un mois par rapport à la période d’état d’urgence. Résultat : les délais de rétractation portant sur un avant-contrat signé pendant la période d’état d’urgence subissent alors un report. Leur échéance étant fixée au 24 juin + 10 jours, ils sont purgés au 3 juillet. Le dispositif vise aussi les compromis et promesses de vente signés dont le délai de rétractation n’était pas achevé au 12 mars 2020.

Exemple 1 : pour un compromis signé le 25 février 2020 et mentionnant un délai de rétractation au 6 mars 2020, la date limite est inchangée.

Exemple 2 : pour un compromis signé le 10 mars 2020 et mentionnant un délai de rétractation au 20 mars 2020, la date limite est le 3 juillet 2020 (délai non achevé au 12 mars).

 Exemple 3 : pour un compromis signé le 26 mars 2020 et mentionnant un délai de rétractation au 4 avril 2020, la date limite est le 3 juillet 2020.

Covid-19 et immobilier 2e étape : l’ordonnance du 15 avril 2020 lève le doute

Si la première ordonnance visait les délais légaux inhérents aux transactions immobilières, délais de rétractation inclus, celle du 15 avril 2020 revoit sa copie. Elle condamne formellement cette interprétation, précisant que le droit de rétractation de dix jours dont bénéficie l’acquéreur d’un bien immobilier (CCH, art. L. 271-1) n’est donc pas « touché » par les circonstances actuelles. En clair, rien ne change en matière de délai de rétractation en période d’état d’urgence sanitaire et ce, quelle que soit la date de la signature du compromis de vente.

Quel impact sur les conditions suspensives ?

Les conditions suspensives d’obtention d’un ou de plusieurs prêts dont les délais de réalisation arrivent à échéance pendant la période juridiquement protégée ne sont pas prorogés. Toutefois, il est conseillé de signer un avenant au compromis pour modifier le délai de 60 jours susceptible d’évoluer en cette période. Objectif : pallier les retards potentiels d’obtention des prêts.

Quid de la production des diagnostics en période de confinement ?

Considérablement retardée par les événements, la réalisation des diagnostics à annexer au compromis de vente peut faire l’objet d’un report au moment de la réalisation de la vente. Cette mesure s’applique également au certificat de mesurage Carrez pour les biens en copropriété. Les compromis de vente alors signés en l’absence de ces données obligatoires comporteront une condition suspensive relative aux résultats des diagnostics concernés.